Comment régénérer facilement son cerveau

Pour stimuler la mémoire et garder l’esprit vif, les principes de base n’ont pas changé. Il peut être facile de régénérer son cerveau. Voici comment.

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Comment régénérer facilement son cerveau?
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Wendy Suzuki était une spécialiste réputée du cerveau. Elle possédait son propre labo et avait à son actif un grand nombre de publications. Mais voilà qu’une classe de gym énergique et une paisible tasse de thé ont changé ses neurones et sa vie. Partez à la découverte des recoins mystérieux du cerveau.

«Je voulais simplement me muscler, mais après six mois d’entraînement aérobique, je me suis rendu compte que les tâches mentales exigeantes étaient devenues plus faciles.

J’étais capable de garder en tête un tas de détails, se rappelle Wendy, qui, à 55 ans, enseigne au centre de neurosciences de l’université de New York. Ma recherche en a été transformée. Elle s’est recentrée sur l’exercice et le cerveau. Et je m’entraîne presque tous les jours.»

Si Wendy avait examiné son cerveau après avoir adopté ses nouvelles habitudes, dont celle d’une méditation quotidienne, elle aurait observé des choses étonnantes: de jeunes cellules cérébrales en train de former des connexions, des vaisseaux sanguins tout neufs apportant plus d’oxygène et de carburant à ses neurones, plus de tissu cérébral dans les zones participant à l’apprentissage, à la mémorisation, à la prise de décisions. Longtemps on a cru que cette régénération, qu’on appelle neuroplasticité, était l’apanage des enfants.

Des recherches ont toutefois démontré que le cerveau en est capable à tout âge. Elle améliore la mémoire, les facultés intellectuelles, la créativité, et elle réduit le risque de démence. Ainsi que le formule Wendy, enthousiaste: «On peut se fabriquer un cerveau plus gros et plus heureux.»

Une pléthore d’études récentes nous apprennent à exploiter la neuroplasticité. Des techniques avancées d’imagerie cérébrale (entre autres instruments de laboratoire) permettent de voir comment tout influe sur les petites cellules grises, du sommeil à l’alimentation en passant par l’activité physique.

Un fait qu’il importe de souligner d’emblée, pourtant: la neuroplasticité profite autant du bon qu’elle est exposée au mauvais. «Environ la moitié de ce que les gens font au quotidien et qui a un effet sur le cerveau est toxique, tranche la neuroscientifique cognitive Sandra Bond Chapman, directrice du centre de la santé cérébrale à l’université du Texas à Dallas.

Ils ne dorment pas assez. Ils se dispersent. Ils sont trop sédentaires.» On peut alors souffrir de brouillard cérébral: c’est ce qui arrive quand on n’a plus les idées claires.

À part corriger ces mauvaises habitudes, que peut-on faire pour multiplier ses neurones? Un indice: les spécialistes ne recommandent pas de dépenser une petite fortune en programmes d’entraînement cérébral ni en suppléments alimentaires. Ils ne prônent pas non plus des techniques de science-fiction comme la stimulation électrique chez soi (voir plus bas).

Voici donc quelques techniques toutes simples que la recherche de pointe rappelle pour régénérer votre cerveau.

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Régénérer son cerveau passe aussi par l'alimentation.
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Mangez des fruits et légumes: selon une étude publiée en 2019, les sujets qui mangeaient plus de fruits et de légumes ont obtenu de meilleurs résultats aux tests de réflexion et de mémoire.

Oui aux légumes verts, non aux nootropes

En 2015, des chercheurs de l’université Deakin, en Australie, ont publié l’une des premières études mesurant l’effet physiologique des aliments sur l’hippocampe gauche, zone cérébrale dont le nom décrit bien la forme, qui joue un rôle crucial dans la mémorisation, l’apprentissage et la prise de décision. C’est l’une des premières parties du cerveau qui s’érode chez les victimes de la maladie d’Alzheimer et d’autres démences. Deux cent cinquante personnes ont rempli des questionnaires sur leur régime alimentaire et ont ensuite subi des examens par résonance magnétique qui ont mesuré leur cerveau. Quatre ans plus tard, elle en ont subi un second.

Il s’est avéré que l’hippocampe gauche était plus massif chez les sujets qui avaient un régime sain que chez ceux dont l’alimentation laissait à désirer, quel que soit l’âge, le sexe, le poids, le niveau d’activité ou l’état de santé général. La différence moyenne, 203 mm2, semble minuscule, mais cela se traduit en beaucoup de cellules et tend à confirmer qu’un régime sain peut protéger le cerveau contre les dégradations intellectuelles et mémorielles qui mènent à la démence.

Parmi les aliments associés à un hippocampe plus volumineux, il y avait les fruits et légumes frais, les salades et le poisson grillé. Le régime menant au résultat inverse comportait, lui, beaucoup de hamburgers, de frites et de boissons gazeuses, de même que des saucisses, des chips et de la viande rouge.

Bien manger fait plus que prévenir la dégénérescence cérébrale. Selon une étude qui a suivi 2621 Américains des deux sexes pendant 30 ans et dont les résultats ont été publiés en mars 2019, une alimentation saine produit de meilleurs résultats aux tests de réflexion et de mémoire. «Les régimes à base de plantes ont des effets antioxydants et anti-inflammatoires semblent protéger contre le déclin cognitif et la démence», affirme Claire McEvoy, directrice de recherche en diététique au centre de santé publique de l’université Queen’s de Belfast, en Irlande du Nord. Voici les 6 meilleurs aliments pour le cerveau.

Il n’en faut pas beaucoup pour faire une grande différence. D’après une enquête de l’université Rush de Chicago, qui a suivi 960 sujets pendant 4,7 ans et dont les résultats ont été publiés en 2018, les participants qui prenaient 1,3 portion de plus de légumes verts feuillus par jour – soit 1,3 tasse de salade ou un peu plus d’une demi-tasse d’épinard, de chou frisé ou de chou pommé cuit – avaient des capacités cognitives semblables à celles de personnes de 11 ans plus jeunes. Et selon un article publié en janvier 2020 dans Neurology, absorber seulement 15,3 mg par jour de molécules végétales appelées flavonols – la quantité procurée par une petite salade verte, une tasse de légumes cuits et une demi-tasse de baies – abaisse de 48% le risque d’une démence de type Alzheimer.

«Ce n’est pas grand-chose au quotidien, observe le Dr Thomas M. Holland, qui a dirigé cette étude. Si vous mangez une grosse salade un jour sur deux, quelques carottes ou morceaux de brocoli au dîner et un goûter de fraises, vous y êtes.»

S’il est clair que l’alimentation joue un rôle important dans la préservation des facultés cérébrales, les spécialistes ne sont en revanche pas convaincus de l’efficacité des suppléments faits pour le cerveau (qu’on appelle parfois nootropes). Ces comprimés et capsules peuvent contenir des vitamines, des minéraux, des antioxydants et des acides aminés outre des herbes, de la caféine, des extraits de thé vert, de la poudre de champignon, de la protéine de méduse ou d’autres ingrédients, mais des études ont démontré qu’ils ne stimulent pas les cellules cérébrales de manière notable.

«Pensez-y bien avant d’acheter», prévient le Dr David Hogan, spécialiste de la médecine gériatrique à l’université de Calgary, au Canada. Il est l’auteur d’une analyse des nootropes qui a paru en 2015 dans le Canadian Geriatrics Journal et qui conclut à l’absence de preuve convaincante d’un quelconque effet positif.

Ajoutez ces délicieux aliments qui dynamisent le cerveau à vos repas!

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Exercice: bouger pour reprogrammer et régénérer son cerveau.
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Exercice: bouger pour reprogrammer le cerveau

La plupart du temps, c’est le cerveau qui commande aux muscles – il vous dit comment frapper une balle, jouer du piano ou ouvrir une boîte de céréales. Mais s’agissant de la régénération cérébrale, de plus en plus de recherches concluent que, pendant une séance d’exercice, ce sont les muscles (ainsi que le foie et la graisse corporelle) qui donnent les ordres.

Quand vous bougez, ils produisent des signaux chimiques qui disent au cerveau: «C’est le temps de grossir!» D’après des recherches récentes, l’activité physique procure au cerveau de multiples bienfaits, stimulant la formation et la croissance des cellules cérébrales ainsi que le développement des vaisseaux sanguins qui leur apportent oxygène et glucose.

En 2016, dans le cadre d’une expérience du National Institute on Aging américain, les participants qui couraient sur un tapis roulant pendant 45 min trois fois par semaine ont stimulé la production d’une molécule appelée facteur neurotrophique dérivé du cerveau, qui est une espèce d’engrais pour les nouveaux neurones. Après quatre mois d’entraînement, leurs résultats à un test de mémoire étaient plus élevés. Sachez qu’il est possible d’entraîner son cerveau grâce à ces exercices pour stimuler les neurones.

Sans exercice, explique Wendy Suzuki, «les neurones nouveau-nés ne grandissent pas et ne font pas les milliers de dendrites qui les rattacheraient aux autres cellules cérébrales. L’exercice est ce qui donne des cellules adultes pleinement fonctionnelles.» Des études estiment que, chez les jeunes adultes, cela augmente le nombre total de cellules dans l’hippocampe. Et quand s’amorce le processus de vieillissement du cerveau, dans la trentaine, l’exercice prolonge la durée de vie des cellules et remplace les vieilles par des neuves. Bonne affaire! «On a des preuves que ces nouvelles cellules sont très actives, dit Wendy. Elles sont très sensibles, comme les adolescents. Elles participent à un plus grand nombre de circuits mémoriels que les cellules plus vieilles. Ça multiplie les connexions.»

Quel que soit votre âge, vous remarquerez peut-être que vous êtes plus alerte et qu’il vous est plus facile de vous souvenir quelque temps après avoir amorcé un programme d’entraînement. Persister pourrait réduire le risque de démence. «Dans le cadre d’une étude passionnante, des femmes qui étaient en forme vers le milieu de leur vie et l’étaient encore à 80 ans passés ont repoussé de neuf ans l’apparition de la démence, relate Wendy. C’est énorme.»

Là encore, il en faut peu pour faire une grande différence. Si vous menez une vie sans grande activité, poursuit-elle, un petit tour du quartier peut déjà stimuler la neuroplasticité. Et chaque pas compte. Selon une étude de l’université de Boston, qui a suivi 2354 adultes de la quarantaine jusqu’à la fin de la soixantaine et dont les résultats ont paru en 2019, les sujets sédentaires qui ont fait au moins 7500 pas de plus chaque jour avaient un cerveau plus gros à la fin du suivi que ceux qui n’avaient pas fait d’exercice – comme si leur cerveau avaient moins vieilli de 1,4 à 2,2 ans. Plus les participants avaient fait d’efforts légers – ménage, courses, jardinage, promenade du chien –, plus leur cerveau était volumineux.

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Le sommeil sert de maintenance nocturne pour régénérer son cerveau.
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Sommeil: la maintenance nocturne

En 2019, des chercheurs de l’université de Boston ont équipé d’électrodes 13 participants et les ont fait dormir à l’intérieur d’une machine d’IRM fonctionnelle pour observer l’activité électrique naturelle de la matière grise. C’était un peu comme filmer la vie secrète du cerveau et c’était tout un spectacle. Il est apparu que, durant la période de sommeil profond, pendant laquelle les ondes cérébrales ralentissent, l’irrigation sanguine de certaines régions diminue, et une plus grande quantité du liquide céphalorachidien qui enveloppe et protège le cerveau s’y infiltre pour ensuite refluer comme une marée. Ce mouvement de fluides semble de nature à stimuler les communications à l’intérieur du cerveau assoupi et à le débarrasser des toxines – déchets laissés par une longue journée de réflexion – qu’on soupçonne d’altérer la mémoire.

Le manque de sommeil affecte la concentration, étouffe la créativité, réduit la capacité de rappel et accroît le temps de réaction de parfois 50%. Les effets sont immédiats: les 130 femmes et hommes d’âge mûr qui ont pris part à une expérience à l’université de Floride du Sud étaient moins concentrés au lendemain d’une nuit où on avait réduit la durée de leur sommeil de seulement 16 minutes. À l’inverse, une bonne nuit de sommeil a doublé la capacité de rappel des mots mémorisés par les sujets la veille, d’après un article publié en 2015 par des chercheurs de l’université britannique d’Exeter.

Pour vous assurer de dormir suffisamment (huit heures est le chiffre magique pour la plupart des gens), «essayez de vous tenir à un horaire, conseille Michael Scullin, neuroscientifique de l’université Baylor, au Texas. Remontez votre horloge biologique en vous exposant à la lumière naturelle en matinée et détendez-vous le soir. Si votre partenaire vous dit que vous ronflez bruyamment, parlez-en à votre médecin. L’apnée obstructive du sommeil peut aggraver certains risques pour le cerveau comme l’hypertension artérielle.»

Vous serez peut-être surpris du grand nombre d’avantages que procure un cerveau bien reposé. «Tous les aspects de la santé cérébrale sont liés à la durée et à la qualité du sommeil, tranche Michael Scullin. Au cours d’une récente étude, nous avons même découvert qu’on pardonne moins facilement quand on a dormi six heures que quand on a dormi sept heures et demie ou huit.»

Apprenez-en plus sur les réactions qu’a le corps quand on ne dort pas assez.

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Jouer pour régénérer son cerveau.
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Jouez: jouer à des jeux traditionnels comme les cartes ou les échecs semble procurer une plus grande vivacité d’esprit, équivalente à 1,4 point de Q. I. de plus.

Faire travailler le cerveau intelligemment

L’industrie de l’entraînement cérébral est devenue un géant de 1,9 milliard de dollars en promettant plus de vivacité d’esprit, une meilleure mémoire et un ralentissement du déclin menant à la démence. Mais l’efficacité de ces jeux d’esprit dépend de votre attitude. Si vous les aimez, ils vont probablement vous aider.

«On doit augmenter la sécrétion d’une substance euphorisante appelée dopamine pour que les cellules cérébrales augmentent, explique le Dr William Shankle, neurobiologiste et directeur médical de l’institut de neurosciences Pickup Family du réseau hospitalier Hoag à Newport Beach, en Californie. Ne faites pas ce qui vous déplaît simplement parce qu’on vous a dit que c’est censé stimuler vos capacités cérébrales.

Choisissez ce que vous aimez. Continuez à apprendre et à vous exercer. Il faut de la passion pour que ça fonctionne. Chez les sujets qui restent intellectuellement actifs, la mémoire et la cognition déclinent plus lentement. Ils développent des réserves cognitives qui aident le cerveau à contourner les obstacles même en présence de symptômes de la maladie d’Alzheimer ou d’une autre démence.» Adoptez ces bonnes habitudes pour éloigner la maladie d’Alzheimer et garder votre cerveau en santé.

En somme, faites ce qui vous fait plaisir. Un suivi de 1091 seniors a établi un lien entre le fait de jouer à des jeux classiques, cartes, loto, échecs, plusieurs fois par semaine et de plus grandes capacités de réflexion et de mémorisation – égales à 1,4 point de Q. I. de plus. Dans le cadre d’un autre suivi mené par la clinique Mayo sur quatre ans, le risque de déficience cognitive légère s’est avéré de 45 à 73% moins probable chez les sujets qui avaient des loisirs de création comme la couture, la sculpture sur bois et la peinture.

La concentration a aussi son importance. «Faire constamment plusieurs tâches à la fois, passer d’une chose à l’autre, nuit au mécanisme de mémorisation de l’hippocampe, explique Sandra Bond Chapman.

Concentrez-vous sur une chose et approfondissez. Ça peut modifier la structure du cerveau et améliorer son fonctionnement.»

Optez pour ces jeux de réflexion qui stimuleront votre cerveau.

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Mieux vaut se calmer pour régénérer son cerveau.
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Calmez-vous

Pendant que vous y êtes, essayez la méditation. Elle peut aider le cerveau en apaisant les circuits du stress affectant la mémoire et la réflexion. (Wendy Suzuki médite tous les jours.) (Apprenez-en plus sur le puissant pouvoir de la méditation sur votre cerveau).

Le yoga aussi stimule la neuroplasticité, nous apprend une méta-analyse de 11 études d’imagerie cérébrale effectuée en 2019 à l’université de l’Illinois à Urbana-Champaign. Les sujets qui pratiquaient le hatha yoga avaient des hippocampes, des amygdales (la zone du cerveau qui gère les émotions) et des cortex préfrontaux (celle qui s’occupe de la planification et de la prise de décision) plus volumineux. Selon les chercheurs, l’effet transformateur du yoga sur le cerveau pourrait tenir à son mélange d’exercice et de forte réduction du stress.

«On peut être tranquillement assis à respirer et récolter les bienfaits de la neuroplasticité», conclut Wendy Suzuki.

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Électriser pour régénérer son cerveau.
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Électriser le cerveau

Les appareils qui soumettent le cerveau à de faibles décharges électriques pour le stimuler, ça marche? Quoique populaires, rien ne le prouve.

Une critique publiée dans Neuron en 2019 a conclu que les déclarations des fabricants n’étaient pas étayées scientifiquement. Et un groupe de neurobiologistes qui étudient la stimulation électrique du cerveau a écrit en 2016 une lettre à la revue Annals of Neurology pour avertir le public qu’infliger à son cerveau des décharges électriques peut avoir des effets nocifs encore indéterminés.

On vous montre comment décupler la force de votre cerveau (sans passer par l’électricité!).

Contenu original Readers Digest International Edition

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