Génétique: une mère et son fils atteints de la même maladie

Pendant 5 ans, Kimberly et son fils ont consulté un médecin au moins une fois par semaine. De souffrent-ils? Est-ce un problème génétique?

Génétique: une mère et son fils découvrent qu'ils sont atteints de la même maladie.Olesya Kuznetsova/Shutterstock
La patiente: Kimberly Macurdy, 57 ans, responsable des achats
Les symptômes: polyarthrite rhumatoïde, claudication, troubles de la vue
Le médecin: DrAndrew Lee, ophtalmologue à l’hôpital méthodiste de Houston

Kimberly Macurdy a toujours eu une mauvaise vue. Elle a porté des lunettes très tôt, et de plus en plus puissantes. Au cours des dernières décennies, cette femme de 57 ans, mère de trois enfants, avait des résultats si piteux aux examens de la vue que l’optométriste, incrédule, lui demandait parfois d’être plus attentive.

En 2008, à la suite d’une dégradation brutale, Kimberly soupçonne qu’il y a peut-être autre chose. Assise dans la cuisine de sa maison de Houston, au Texas, elle se rend compte que, même avec ses lunettes, elle est incapable de lire l’heure sur le micro-ondes de l’autre côté de la pièce. Dans son travail de responsable des achats, elle a de plus en plus de mal à déchiffrer des tableurs pourtant sous son nez.

Son optométriste ne comprend pas la cause de ses troubles oculaires, pas plus qu’une série d’autres médecins – dont un ophtalmologue et des spécialistes de la rétine et de l’optique. Quelques-uns suggèrent même que ses symptômes sont imaginaires, une réaction au stress provoqué par une crise familiale: à la même époque, son benjamin, Braden, âgé de sept ans, est hospitalisé d’urgence trois fois pour des vomissements, de la fièvre et une grave déshydratation. Kimberly convient qu’elle est stressée, mais reste convaincue qu’elle n’invente rien et continue à chercher des réponses.

En 2009, elle voit le Dr Andrew Lee, chef du service d’ophtalmologie à l’institut de la vue Blanton de l’hôpital méthodiste de Houston. Un soir, peu avant un rendez-vous, elle est prise de convulsions et s’étale par terre, tremblant comme une feuille. Elle se traîne jusqu’à son lit pour se réveiller plus tard dans sa propre urine.

Ce n’est pas la première fois qu’elle fait ce genre de crise, mais celle-ci lui donne l’idée de dresser la liste de ses autres maux chroniques: polyarthrite rhumatoïde, claudication, fièvre récurrente, troubles de la vue, qui ont dégénéré en spasmes oculaires. «J’avais l’impression que mes yeux bondissaient comme un ballon de basketball», dit-elle.

Kimberly transmet sa liste au Dr Lee, priant pour qu’il arrive à faire un lien entre tous ses malheurs. Quand elle se présente à son cabinet, elle sent bien qu’il a compris sa situation. Il n’est pas sûr du diagnostic, mais avance une hypothèse: la sclérose en plaques, qui pousse le système immunitaire à attaquer la myéline, tissu gras qui enrobe et protège les nerfs, ce qui provoque fréquemment des troubles oculaires. Ceux qui en souffrent ont aussi souvent de la difficulté à marcher. Dans sa voiture après ce rendez-vous, Kimberly fond en larmes: elle a enfin l’espoir de savoir de quoi elle souffre.

Une IRM confirme l’hypothèse du médecin: la myélinisation cérébrale de Kimberly est anormale. C’est un signe de SP, maladie pour laquelle il n’existe cependant aucun test diagnostique probant.

Et elle est incurable. Les médecins de Kimberly lui prescrivent toute une série de médicaments contre ses symptômes et la renvoient chez elle. Voici ce que votre médecin ne vous dit pas sur les tests génétiques.

Au moment même où Kimberly commence à avoir des réponses, son fils en obtient lui aussi. Un endocrinologue présume que les crises de Braden sont causées par un dysfonctionnement des glandes surrénales, organes qui sécrètent les stéroïdes naturels dont le corps a besoin pour excréter l’excès de potassium. Il lui prescrit de l’hydrocortisone pour rétablir l’équilibre chimique de son organisme.

Pendant cinq ans, Kimberly et son fils voient au moins un médecin par semaine. Les médicaments prescrits au départ à Kimberly n’ayant pas l’effet espéré, ses médecins ne cessent d’en proposer de nouveaux. À un moment, elle prend 22 pilules par jour. Devant veiller à la fois sur sa santé et sur celle de Braden, elle se sent dépassée. «C’était fou, se rappelle-t-elle. Je continuais à tomber dans le vide.»

En 2015, Braden est de nouveau hospitalisé. Sa mère demande des analyses additionnelles et, en 2016, les résultats d’un test génétique révèlent qu’il est porteur de la mutation d’un gène qui aide normalement les cellules à dégrader des acides gras à très longue chaîne isolant des fibres cérébrales. En excédent, ils détruisent la myéline dans tout son corps. On appelle cette maladie adrénoleukodystrophie (ALD). Elle frappe environ une personne sur 20000 et est incurable. Certains porteurs n’ont aucun symptôme et mènent une vie normale, d’autres meurent à l’adolescence. Quand Braden, qui a maintenant 15 ans, demande combien de temps il lui reste à vivre, les médecins répondent: «Nous ne le savons pas.»

Ce diagnostic dévastateur permet de dénouer l’affaire. Quand, au rendez-vous suivant avec le Dr Lee, Kimberly le mentionne en passant, le médecin arrête net d’écrire. «Quoi?» s’écrie-t-il. Il soupçonne que l’ALD, de nature génétique, pourrait expliquer la maladie de Kimberly. Un test confirme qu’elle a non seulement la SP, mais aussi la même mutation que son fils. Les deux mystères n’en font plus qu’un.

L’ALD étant liée au chromosome X, elle se manifeste surtout chez les hommes. «Voilà pourquoi le fils avait tous les symptômes et que le diagnostic était évident dans son cas», explique le Dr Lee. Les manifestations de la maladie sont beaucoup plus rares chez les femmes.

Le diagnostic établi, Kimberly fait le tour des groupes de soutien aux victimes de l’ALD sur Facebook et repère à la clinique Mayo de Rochester (au Minnesota) un spécialiste qu’elle et Braden voient aujourd’hui au moins une fois par an. Il leur fait subir des tests et des analyses sanguines pour contrôler les marqueurs d’une détérioration et s’assure que la maladie ne progresse pas.

Après avoir passé sa vie à lutter contre des symptômes déroutants, Kimberly est soulagée de savoir ce qu’elle et son fils doivent combattre.
«Si je n’avais pas poussé les médecins à chercher, nous ne saurions vraiment rien, dit-elle. Mais je ne suis pas une héroïne, juste une mère qui fait ce qu’elle doit faire.»

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Contenu original Readers Digest International Edition