J’ai été arnaqué par ma meilleure amie

Elle m’a soutiré 92 000$, m’a poussé à la faillite et a miné ma nature optimiste. Mais j’ai enfin obtenu justice.

Une arnaque à l'amitié.
Avec l'autorisation de JohnathanWalton.com

«Je peux vous aider», a-t-elle dit. Et avec ces quatre mots, un cauchemar de quatre ans a commencé alors que je fonçais droit dans le panneau d’une des plus vieilles escroqueries connues: l’arnaque à l’héritage.

Pourtant, cette fraude n’a pas été imaginée par quelque prince nigérian fictif sollicitant mon aide dans un courriel suspect. Je suis tombé sous l’emprise d’une femme très sympathique qui s’est immiscée dans ma vie jusqu’à devenir ma meilleure amie. Malheureusement, c’était également une arnaqueuse internationale poursuivie par les autorités et j’allais bientôt devenir l’un de ses nombreux pigeons.

Elle m’a extorqué près de 100 000$ au moyen d’une série de brillants abus de confiance, détruisant simultanément mon estime de soi et assombrissant ma nature autrefois joyeuse.

Et tout en gâchant ma vie, elle escroquait également des dizaines d’autres personnes aux quatre coins du monde en se faisant passer pour une voyante, une courtière hypothécaire, une psychologue, une avocate, un agent de voyages, et même une victime du cancer.

C’était une véritable reine de l’arnaque, qui avait recours à des déguisements et de la chirurgie esthétique pour modifier son apparence d’un délit à l’autre. J’étais un producteur de télé-réalité vivant à Los Angeles, et j’ai été complètement dupé par ses performances magistrales.

Elle aurait pu continuer à arnaquer de nombreuses autres personnes si elle ne m’avait pas involontairement transformé en impitoyable justicier. Car au lieu de m’effondrer complètement à la suite de son vol – et de la faillite vers laquelle elle m’a poussé –, j’ai réussi à trouver la force insoupçonnée de me dégager de ces décombres. Et j’ai riposté. J’ai ouvert ma propre enquête sur ses escroqueries, découvert d’autres victimes, et contribué à la traîner devant la justice.

Aujourd’hui, elle est en prison, se demandant certainement comment elle a pu devenir la victime de l’une de ses propres proies.
Laissez-moi raconter.

Il y en a qui jouent avec les sentiments des gens: c’est le cas des «arnacoeurs» qui séduisent leurs proies.

Arnaque à l'amitié: elle s’est présentée à moi sous le nom de Mair Smyth en mai 2013.
Avec l'autorisation de JohnathanWalton.com
Mair est devenue plus qu’une simple voisine ou même une amie proche. Elle, mon mari Pablito (à droite), et moi étions une famille.

«Je vous adore»

Elle s’est présentée à moi sous le nom de Mair Smyth en mai 2013, en rejoignant dans mon salon un groupe de voisins en colère, pour discuter des mesures à prendre après avoir perdu l’accès à la piscine de notre immeuble en raison d’une bataille juridique avec un immeuble voisin.

«Je peux aider, nous a-t-elle affirmé. Mon petit ami est avocat, il peut nous rendre la piscine!»

Je l’ai aussitôt appréciée. Comme nous tous. Elle était impertinente. Drôle. Extrêmement intelligente et très franche. Paradoxalement, pour quelqu’un qui était en réalité une menteuse et arnaqueuse professionnelle, elle renvoyait l’image d’une femme qui vous dirait toujours les choses en face.

Elle semblait également très aisée. Elle portait des Jimmy Choo hors de prix et m’a un jour montré sa garde-robe qui en contenait plus de 250 paires. J’ai plus tard découvert qu’elles étaient toutes fausses.

Après cette première rencontre dans mon appartement ce soir-là, Mair nous a invités, mon mari Pablito et moi, à dîner. Au cours de l’année qui a suivi, elle nous a souvent emmenés boire et dîner dans des restaurants huppés où elle insistait toujours pour payer l’addition. «Je vous adore, plaidait-elle de manière très convaincante. J’ai beaucoup d’argent – laissez-moi payer!»

Nous passions presque toutes nos soirées ensemble dans notre coin barbecue, à échanger des confidences. Mair nous a raconté qu’elle était originaire d’Irlande. Un soir, elle a pointé un document encadré affiché dans son salon. «C’est la Constitution irlandaise, a-t-elle déclaré. Vous voyez cette signature en bas? C’est celle de mon grand-oncle.»

Comme mes connaissances de l’Irlande étaient limitées, je l’ai crue. J’ignorais totalement que, comme ses chaussures, cette histoire était fausse.

Mair m’a apporté du thé et des pâtisseries irlandaises, et m’a régalé d’histoires de son enfance, lorsque sa grand-mère, qui était soi-disant dans l’armée républicaine du pays, l’emmenait au sommet d’un pont pour lui apprendre comment lancer des cocktails Molotov sur les soldats britanniques. J’étais à la fois captivé et horrifié. Mais ses récits familiaux étaient tout aussi mensongers.

Lorsque je lui ai confié, les larmes aux yeux, qu’une partie de ma famille m’avait renié parce que j’étais homosexuel, elle a bondi. «Ma famille aussi m’a reniée!, a-t-elle avoué en refoulant ses larmes. Ils essaient de me déshériter.» Et soudain, nous n’étions plus seulement de nouveaux amis, nous étions deux âmes abandonnées nouant un lien étroit par notre douloureuse histoire familiale.

Mair m’a raconté qu’un de ses oncles, le patriarche de sa famille, était récemment décédé, et que ses cousins se divisaient un patrimoine d’une valeur d’environ 34 millions de dollars canadiens. Elle a prétendu devoir recevoir sa part de l’héritage, soit 5,5 millions de dollars. Au fil des mois, elle me montrait régulièrement des textos et des courriels irrités de ses cousins irlandais la menaçant de lui refuser son héritage.

Je n’avais pas compris que Mair avait en réalité créé de toutes pièces ces comptes de messagerie et de téléphone pour jouer le rôle de ses «cousins».

Elle m’a affirmé avoir emporté beaucoup d’argent de sa famille en quittant l’Irlande plusieurs années auparavant, afin d’être financièrement indépendante. Mais elle disait aimer travailler, et avait donc trouvé un emploi dans une agence de voyages à Los Angeles, où elle vendait des vacances de luxe. Elle prétendait que sa famille faisait beaucoup affaire avec cette entreprise, ce qui avait facilité son embauche.

Évitons les arnaques en étant plus malins que les escrocs!

De faux textos et de faux courriels pour une arnaque à l'amitié bien ficelée.
Alexey Rotanov/Shutterstock

Monter l’arnaque

Au bout de 14 mois d’amitié, Mair et moi étions comme frère et sœur, terminant même nos appels téléphoniques d’un «je t’aime». Elle m’a dit que ses avocats éprouvaient des difficultés pour récupérer son héritage et l’avaient mise en garde contre une clause dans le testament de son oncle stipulant que si un membre de la famille était reconnu coupable d’un délit, cette personne perdrait sa part de l’héritage.

Mair bâtissait la structure de son escroquerie en détails si passionnants que je suis devenu un véritable joueur dans sa supercherie. Au lieu que ce soit elle qui me confiait les nouveaux épisodes de son affabulation, c’est moi qui sans le savoir les lui soufflait.

«Tu devrais faire attention!, l’ai-je avertie. Comme ta famille fait affaire avec l’agence de voyages qui t’emploie, l’un de tes cousins mécontents pourrait essayer de monter un stratagème pour t’inculper d’un méfait et te priver de ta part d’héritage!»

J’avais lu des articles sur des maris dépossédant ainsi leur femme de millions de dollars en polices d’assurance. Il s’agissait ici de 5,5 millions de dollars. Et selon les courriels et textos que je lisais, plusieurs membres de sa famille semblaient la détester. Ils pourraient lui tendre un piège, ai-je songé.

Le 8 juillet 2014, mon téléphone a sonné.

«Vous avez un appel en PCV d’un détenu du centre de détention régional Century. Appuyez sur 1 pour accepter», m’a indiqué une voix robotisée.
C’était Mair. J’ai aussitôt appuyé sur 1.

«Tu avais raison! sanglotait-elle. J’ai été arrêtée aujourd’hui. Ma famille m’a piégée pour faire croire que j’avais volé 200 000$ à mon travail.»

«Je t’avais dit que ça arriverait!», me suis-je écrié. J’étais bouleversé. J’ai trouvé un prêteur de caution et l’ai payé 4200$ pour la faire sortir de prison. C’est là que j’ai découvert que son vrai nom était Marianne Smyth et pas Mair Smyth. Mais elle m’a remboursé le lendemain, à sa libération. Ou plutôt, l’homme marié qu’elle fréquentait à l’époque m’a remboursé. J’ignorais (tout comme lui) qu’elle l’arnaquait également.

Au fil des mois, Mair m’a montré des courriels de ses avocats lui assurant que la procédure qui la visait ne tenait pas debout. Je ne me doutais pas du tout que ces courriels provenaient de faux comptes qu’elle avait elle-même créés, tout comme les messages de ses prétendus cousins.

Puis, après presque trois ans d’amitié, elle m’a annoncé que le procureur de district qui la poursuivait en justice avait gelé ses comptes bancaires. Elle était dévastée. J’ai commencé à lui prêter de l’argent. Elle m’avait aussitôt remboursé ce que j’avais avancé pour la faire sortir de prison, je pensais donc avec confiance qu’elle me rembourserait tout autre prêt d’argent.

Mais c’est bien là le problème: le véritable talent des escrocs est de gagner votre confiance pour s’en servir ensuite à vous soutirer de l’argent. Voici comment s’y prennent les arnaqueurs pour gagner votre confiance.

En l’espace de plusieurs mois, j’ai prêté à Mair près de 15 000$. On pourrait croire que l’idée de lui prêter de telles sommes m’aurait inquiété, mais ce n’était pas le cas.

Non seulement c’était ma meilleure amie, mais elle prétendait également être sur le point d’hériter – du moins c’est ce que les courriels de ses «avocats» assuraient. Je n’ai jamais soupçonné une seconde que quelque chose de louche pouvait se tramer.

Un jour, Mair m’a appelé et a déclaré que le procureur de district exigeait 50 000$ pour classer son dossier. Je ne disposais pas de cette somme en liquide. Mais j’avais une bonne cote de crédit. Je l’ai donc laissée charger 50 000$ sur mes cartes de crédit au moyen de son compte PayPal, afin de faire abandonner les poursuites contre elle, ouvrant ainsi la voie à l’obtention de son héritage et à mon remboursement.

Je n’étais jamais entré dans un tribunal que pour des excès de vitesse. Je connaissais très mal le système de justice pénale. En outre, Mair était désormais comme un membre de ma famille. Je n’aurais jamais imaginé qu’elle puisse m’escroquer.

Johnathan Walton: j'ai été arnaqué par ma meilleure amie.
Joleen Zubek
Johnathan Walton: «Ma douleur s’est métamorphosée en une profonde détermination.»

Une découverte dévastatrice

Quelques mois plus tard, Mair a de nouveau été arrêtée. Elle m’a expliqué que le juge responsable de son dossier voulait qualifier son geste de charger mes cartes de crédit avec son compte PayPal de «blanchiment d’argent» et la punir de 30 jours de prison. Cette sentence ne punissait pas un crime – elle affirmait qu’il s’agissait juste d’une «tape sur la main» – et m’a assuré, une fois de plus, que dès qu’elle sortirait et recevrait son héritage, elle me rembourserait.

Mair m’appelait quotidiennement depuis la prison. Quand j’ai annoncé vouloir lui rendre visite, elle m’a supplié de ne pas le faire. «Je ne veux pas que tu me voies dans cet état», a-t-elle imploré. Mais j’ai insisté. Je me suis donc inscrit sur le site internet de la prison pour planifier une visite. C’est là que tout s’est effondré et que la véritable dévastation qu’elle avait semé dans ma vie a commencé à apparaître.

Le site indiquait que Mair était incarcérée pour vol aggravé. C’était loin d’être une simple tape sur la main.

J’ai pris congé et me suis précipité dans un palais de justice de Los Angeles. Les mains tremblantes, j’ai commencé à passer en revue toutes les archives que j’ai pu trouver du dossier de Mair. J’ai découvert qu’elle m’avait menti sur tout. J’avais soudain l’impression de manquer d’air.

J’ai appris que les 50 000$ que je l’avais autorisée à charger sur mes cartes de crédit avaient servi à payer 40 000$ dans le cadre d’une entente relative au plaidoyer pour une accusation de vol aggravé à laquelle elle faisait face pour avoir volé plus de 200 000$ à l’agence de voyages qui l’employait. Si elle n’avait pas pu disposer de ces 40 000$, elle aurait été condamnée à cinq ans de prison, et pas les 30 petits jours qu’elle a réellement purgés.

Ses comptes en banque n’avaient jamais été gelés, ai-je découvert. Il n’y avait pas de riche famille irlandaise ou d’héritage. Elle n’était même pas irlandaise! Il ne s’agissait que d’un tissu de mensonges brodé pour me piéger.

Je suis rentré chez moi et me suis effondré dans les bras de mon mari. «Comment ai-je pu laisser cela nous arriver?», ne cessais-je de sangloter. J’étais inconsolable.

Finalement, ma douleur a laissé place à une colère farouche et à la détermination d’agir.

Le jour où Mair a été libérée de prison, je l’ai mise face à ses mensonges dans le parking devant notre immeuble. Je lui ai dit que je savais qu’elle n’était pas irlandaise. Je savais que personne n’avait gelé ses comptes. Je savais qu’il n’y avait pas d’héritage. Elle a tout nié en bloc. «Ce n’est pas vrai Jonathan! Ce n’est pas vrai!», ne cessait-elle de plaider, des larmes ruisselant sur son visage.

Mais je savais désormais que ces larmes, comme tout le reste de sa vie, étaient une pure fabrication. Et je ne croyais plus un mot de ce qu’elle racontait. J’ai serré les poings, la mâchoire tendue, et j’ai tourné les talons. Nous ne nous sommes plus jamais reparlé.

Quelques jours plus tard, en mars 2017, je suis allé porter plainte. L’agent qui m’a reçu semblait douter de pouvoir faire quoi que ce soit. «Ne donnez pas votre argent à des inconnus», ont été ses derniers mots à mon égard. J’ai donc entamé ma propre enquête.

J’ai déniché l’album photo de l’école secondaire de Mair Smyth et appris qu’elle était née sous le nom de Marianne Andle dans l’État américain du Maine, puis qu’elle avait obtenu son diplôme à la Bangor High School en 1987. Elle a ensuite déménagé au sud, dans le Tennessee, où, selon des membres de sa famille dont elle s’était éloignée et à qui j’ai parlé, elle a prétendu être atteinte d’un cancer du sein et aurait escroqué des amis et voisins de milliers de dollars pour des «traitements».

Ils m’ont affirmé que Mair était curieusement obsédée par le désir d’être irlandaise. En 2000, elle s’est rendue dans ce pays pour des vacances. Elle y a épousé un homme et a vécu neuf ans là-bas.

Arnaque à l'amitié: en tout, Mair Smyth a emprunté au moins 23 fausses identités.
Avec l'autorisation de JohnathanWalton.com
En tout, Mair Smyth a emprunté au moins 23 fausses identités.

De nombreuses victimes

Tout comme les pieux en bois pour les vampires et les balles en argent pour les loups-garous, la publicité est fatale aux escrocs professionnels. Ma douleur s’est métamorphosée en une profonde détermination. J’ai ouvert un blog qui détaillait la façon dont Mair m’avait extorqué tout cet argent. Bientôt, d’autres victimes de cette femme, venues du monde entier, ont commencé à me contacter.

L’une d’elles a affirmé que Mair lui avait soutiré 10 000$ en se faisant passer pour une psychologue. Elle aurait également obtenu du propriétaire de notre immeuble 12 000$ en prétendant avoir un cancer.

J’ai creusé un peu et découvert que Mair souffrait en fait d’anémie ferriprive et évitait volontairement les aliments riches en fer pour être admise à l’hôpital et recevoir des perfusions de fer. Allongée sur un lit d’hôpital pendant quelques heures, elle demandait à une infirmière de la prendre en photo, puis envoyait cette image par courriel à ses victimes pour mieux vendre sa fable du cancer. Elle utilisait beaucoup ce stratagème en particulier.

J’ai même reçu un appel d’un détective de police en Irlande du Nord. Il m’a appris que les autorités de Belfast recherchaient Marianne Smyth depuis des années. En 2008, employée comme courtière hypothécaire, elle aurait escroqué de nombreuses personnes avant de disparaître.

Ce n’est qu’une petite partie des histoires que j’ai découvertes. En tout, Mair Smyth a emprunté au moins 23 fausses identités. Sous le nom de «Mair Aine», elle a travaillé pendant des années comme voyante, dépouillant des gens vulnérables en exploitant leurs secrets et confidences les plus privés. Elle a également été condamnée pour fraude et vol aggravé en Floride et dans le Tennessee sous le nom de «Marianne Welch».

Déterminé à obtenir justice, j’ai appelé tous les jours le service de police de Los Angeles. Ils ont fini par passer 11 mois à enquêter sur mon dossier.

Finalement, début 2018, un an après l’avoir vue pour la dernière fois, Mair a été arrêtée et condamnée pour vol aggravé pour m’avoir escroqué. Elle a été libérée sous caution personnelle, ce qui s’est avéré une grave erreur. Je ne l’ai jamais approchée, mais un mois avant le procès, Mair a demandé une ordonnance de non-communication à mon encontre, soutenant que j’avais menacé de la violenter. J’ai dû encore débourser 1500$/1400€ en frais d’avocat pour me défendre contre ses mensonges.

«Si un juge accorde l’ordonnance de non-communication, vous n’aurez plus le droit de témoigner contre elle dans un procès pénal», m’a expliqué l’avocat.

Était-ce un échec et mat de sa part? me suis-je demandé. J’étais hors de moi.

Heureusement, le juge a refusé l’ordonnance de non-communication et le procès de Mair s’est déroulé comme prévu. L’accusation a présenté une montagne de preuves irréfutables. Bien qu’elle n’ait été condamnée que pour ses crimes à mon encontre, le juge a autorisé le témoignage de trois autres victimes pour démontrer que mon cas n’était pas unique.

Mair n’a pas témoigné pour sa propre défense. Pendant que les témoins décrivaient la manière dont elle les avait escroqués, elle se contentait de rester assise, le visage impassible. C’est certainement ce qui l’a réellement trahie aux yeux du jury. C’était une brillante actrice dans le cadre de ses arnaques, mais étonnamment elle ne savait pas jouer les innocentes.

La seule défense dont disposait son avocat pour le jury était de prétendre que j’avais inventé toute cette histoire. J’aurais soi-disant persuadé tous les autres témoins – des personnes que je ne connaissais pas avant l’arrivée de Mair dans ma vie – de mentir sous serment afin de réaliser un documentaire captivant sur mon expérience avec Mair. Il était terriblement convaincant.

J’avais effectivement décidé de faire un documentaire sur Mair. Lorsque je me suis présenté à la barre, son avocat m’a demandé pourquoi je témoignais contre elle.

«Je veux mettre les gens en garde contre elle, ai-je répondu. Quand j’en aurai terminé avec Marianne Smyth, le monde connaîtra son visage et elle ne pourra plus jamais escroquer personne.»

Témoigner au procès était particulièrement éprouvant. Le procureur a détaillé par le menu chaque dollar soutiré. Revivre cette expérience devant une salle pleine d’inconnus réveillait ma rage et ma honte, ainsi que des regrets en un nouveau cocktail douloureux. J’étais dans tous mes états.

Redoublez de vigilance et lisez le témoignage de cet homme qui s’est fait arnaquer par courriel.

Arnaque à l'amitié: «j’ai passé deux ans à poursuivre Marianne Smyth».
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Justice, enfin

J’ai passé deux ans à poursuivre Marianne Smyth. Cette épreuve m’a consumé. J’ai dû déclarer faillite à cause de ce qu’elle m’avait fait subir. Et mes 24 comparutions en cour avant même le procès – pour des prorogations, des requêtes préalables au procès et des auditions – m’ont forcé à manquer régulièrement le travail et perdre ainsi encore plus d’argent. Sans parler du coût des détectives privés embauchés dans plusieurs États pour révéler toutes ses fraudes.

Mais le jeu en valait la chandelle.

Le 9 janvier 2019, Marianne Smyth a été reconnue coupable de m’avoir escroqué de 91 784$ – l’argent emprunté plus les milliers de dollars d’intérêts accumulés sur mes cartes de crédit. Elle a été condamnée à cinq ans de détention.

De toutes les victimes retrouvées au cours de mon enquête, seules deux avaient dénoncé Mair à la police. Elle a pu ainsi poursuivre ses arnaques pendant des années avant de me rencontrer. La plupart de ses victimes, comme c’est souvent le cas avec un escroc professionnel, éprouvaient trop de honte pour oser avouer ce qui leur était arrivé. J’ai honte, moi aussi. Mais ma détermination à l’empêcher de blesser d’autres personnes est bien plus puissante que mon embarras.

Cette expérience m’a changé à jamais. Je suis désormais suspicieux de tout et de tout le monde. Je vais souvent remarquer la plus infime incohérence dans le discours de ceux que je rencontre et leur renvoyer ensuite ce détail à la figure avant d’exiger une explication.

Je ne sais plus me faire d’amis. Mais je n’y peux pas grand-chose. J’ai été utilisé par une femme en qui j’avais réellement confiance – et que j’aimais. Lorsqu’on est détruit de cette manière inimaginable et très spécifique, il est impossible de redevenir ce que l’on était avant.

Si ma vie ne sera plus jamais la même, j’espère que d’autres peuvent apprendre de mon expérience avec Marianne Smyth et s’éviter ainsi les mêmes déboires. Si vous rencontrez une nouvelle personne dont le passé regorge de drames et d’intrigue, ou se démarque simplement par des circonstances très inhabituelles (surtout si de l’argent est en jeu), il y a de bonnes chances que l’on essaie de vous arnaquer.

Vous ne rencontrerez peut-être pas quelqu’un d’aussi sournois ou malhonnête que Mair, mais les abus de confiance sont plus courants que vous ne le pensez. Votre vie entière peut changer en accordant votre confiance à quelqu’un qui convoite ce que vous possédez et ne s’arrêtera devant rien pour l’obtenir.

Tiré de Huffpost.com (16 août 2019) ©2019 Johnathan Walton.

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