Le livre Perdre la tête de Heather O’Neill

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Le livre Perdre la tête de Heather O'Neil

Perdre la tête de Heather O’Neill

(30,95 $, ALTO)

De quoi ça parle: Le roman se déroule à Montréal, en 1873, dans de splendides demeures du Golden Mile où vit une bourgeoisie en plein essor. Il raconte l’amitié de deux adolescentes : Sadie Arnett, fille de politicien, psychopathe en devenir, copie en jupons du Marquis de Sade, et Marie Antoine, belle héritière, fille d’un négociant.

Sadie est tout à la fois attirée et révulsée par la beauté de Marie, Marie l’est de la même façon par la lubricité de Sadie. Prisonnières de leur monde, les deux jeunes filles adoptent des comportements de plus en plus choquants, lisant des poèmes érotiques, puis assassinant des chats, jusqu’à ce qu’un acte d’une violence atroce oblige leurs parents à les séparer. Le livre les réunit neuf ans plus tard ; entre-temps, Marie a transformé le négoce de son père en empire tandis que Sadie, fidèle à l’esprit qui animait le Divin Marquis, vit dans un bordel et écrit des romans pornographiques. L’un d’eux attire l’attention de Marie et ranime leur relation destructrice.

Pourquoi vous aimerez ça: Heather O’Neill prend un plaisir fou à brosser le portrait de ses joyeuses meurtrières, dépeignant leurs frasques avec autant de précision que leurs tenues guindées. Brillant et satirique, ce livre est au fond un fantastique roman noir sur l’intensité de l’amitié féminine, ses fluctuants rapports de force et son occasionnel mélange toxique de jalousie et d’intimité.

La complexité du récit vous forcera à lire jusque tard dans la nuit, car vous voudrez désespérément savoir jusqu’où la dépravation de Sadie et Marie les conduira. Vous voudrez aussi savoir pourquoi la tragique boulangère Mary Robespierre (oui, comme le Robespierre) éprouve une telle haine envers Marie Antoine et comment George, l’amant éconduit par Sadie, transforme sa vengeance en révolution des travailleurs contre l’élite indifférente de la ville.

Qui l’a écrit: Heather O’Neill fait partie des grandes chroniqueuses littéraires de Montréal. Son premier roman, La ballade de Baby, relate l’histoire déchirante du passage à l’âge adulte d’une ado précoce happée par le monde de la drogue et de la prostitution. Cet ouvrage a propulsé la romancière au firmament littéraire. Hôtel Lonely Hearts, Son avant-dernier roman, raconte une histoire d’amour entre deux enfants abandonnés, pensionnaires d’un orphelinat de Montréal pendant la Grande Dépression. L’un est un prodige du piano, l’autre un acteur charismatique ; tous deux se perdent dans le flamboyant monde interlope de Montréal. Dans chacun de ses romans, Heather O’Neill fait de cette ville un lieu à la fois magique et trouble, où l’amour idéal côtoie le courage indestructible.

EXTRAIT
Au cœur d’un labyrinthe de rosiers, dans le Mile doré, deux fillettes se tenaient dos à dos, le canon de leurs pistolets levé vers le menton. Elles se mirent à compter à voix haute ensemble en avançant chacune de quinze pas.

Marie Antoine et Sadie Arnett avaient fait connaissance dans le parc sur le mont Royal, derrière chez elles, à l’âge de douze ans. C’était en l’an 1873. […]

Une bonne observait la scène depuis une fenêtre à l’étage où elle boutonnait sa nuisette en sifflotant. De son poste en surplomb, elle pouvait voir l’intérieur du labyrinthe et la clairière en son centre. D’abord, elle n’en crut pas ses yeux.

L’espace d’un instant, l’adulte reste en suspens dans le royaume de l’incrédulité enfantine. Puis la bonne brisa l’enchantement. Elle descendit l’escalier quatre à quatre, en culotte et en nuisette. Ses cheveux roux flottaient derrière elle comme si elle portait une torche enflammée.

Elle traversa le labyrinthe en hurlant. Enfin, elle y fut. Debout entre les deux jeunes filles, elle ouvrit la bouche pour leur ordonner d’arrêter au moment précis où elles se retournaient pour faire feu. Les deux balles atteignirent la bonne, qui s’effondra, les paroles destinées à mettre en garde les fillettes contre leur bêtise envolées à jamais. (p. 9-10)

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Contenu original Selection du Reader’s Digest