«Sexe vanille»: champion toutes catégories?

Heureux en ménage, l’auteur avoue préférer le sexe vanille qui se pratique entre époux à tout ce qu’il a pu expérimenter d’autre durant ses années de célibat. Voici pourquoi.

«Sexe vanille»: champion toutes catégories?

Si je ne me trompe pas, l’expression «sexe vanille» a été inventée pour décrire les rapports sexuels ne faisant appel à aucun gadget, accessoire, costume, tierce personne, chaîne, ficelle ou autres entraves, non plus qu’à la domination et autres rôles apparentés, et qui se déroulent dans un lit plutôt que, disons, dans un donjon.

L’expression a plutôt un sens péjoratif, n’est-ce pas? Quoi? Deux personnes nues faisant l’amour dans un lit, c’est tout? Assommant! Pardonnez-moi si je baille!

Cependant, je revendique le droit de me réapproprier le terme et de le retourner pour lui donner un sens positif, comme dans: Mmm!… elle m’a embrassée et c’était tellement vanille! Pourquoi, d’ailleurs, le bon vieux sexe vanille a-t-il si mauvaise réputation? Je dirais d’abord que c’est la faute à Sting, et de un. Il a contribué à populariser la notion que la durée de l’acte était d’une extrême importance et que plus on en avait, meilleur c’était. Il est devenu célèbre pour ses pratiques sexuelles tantriques après qu’un journaliste ait raconté l’avoir entendu dire à son ami Bob Geldof que les séances de sexe avec sa femme, Trudie Styler, duraient six heures.

Je reproche également à Madonna d’avoir popularisé le BDSM (bondage, domination et sado-masochisme) réservé jusque là à l’élite des milieux chics. Publié en 1992 et vendu à des millions d’exemplaires, Sex, un livre qui a fait scandale à l’époque, la montrait dans des poses osées et d’un goût pour le moins douteux.

J’accuse aussi les films d’Hollywood, de 9 semaines ½ à N’oublie jamais, d’avoir répandu la notion que le sexe est plus excitant si: a) cela se passe dehors, particulièrement s’il pleut b) vous ne connaissez pas bien votre partenaire c) quelqu’un ou bien rit ou bien crie 2) quelqu’un vous passe un glaçon sur le corps.

Erreur, erreur, triple erreur. À mon avis, et c’est celui d’un homme heureux en ménage depuis 12 ans, mieux on connaît une personne, meilleur est le sexe car on peut se détendre et être soi-même. C’est aussi meilleur dans un lit, où les deux partenaires sont au chaud et au sec, et où, selon les circonstances, ils peuvent se glisser sous les couvertures ou les retirer. Et encore meilleur lorsqu’il ne fait appel à aucun ingrédient sortant du réfrigérateur ou pire, du congélateur.

Autre chose: le sexe satisfaisant ne dure pas longtemps. Selon les conclusions d’une enquête menée auprès des sexologues américains et canadiens, et publiée dans la revue The Journal of Sexual Medicine, la durée «adéquate» ou «souhaitable» d’un rapport sexuel, si on exclue les préliminaires, oscille entre trois et treize minutes. Passé dix minutes, ça commence à faire long, écrivent les auteurs.

Je ne tiens pas à révéler les détails de ma vie intime, mais je dois dire qu ma curiosité a été piquée par cette conclusion des chercheurs: trois minutes suffisent pour que les deux partenaires soient satisfaits. Bref, Sting, tu peux aller te rhabiller! Et vive la p’tite vite!

Les auteurs de l’étude ne précisent pas ce qui doit se passer durant cette séance de trois è treize minutes, mais divers experts avec lesquels je me suis entretenu ont observé que pour bien des couples, le sexe vanille est celui qui dure le plus longtemps.

“Il y a une grosse différence entre le sexe vanille et le sexe médiocre», de dire la sexothérapeute Sue McGarvie, qui reste convaincue que la sexualité est ce qui tient ensemble un couple. «Le sexe vanille peut être spectaculaire s’il est intime et laisse place aux émotions.»

Cory Silverberg, qui enseigne la sexualité à Toronto, abonde dans ce sens. «L’erreur, c’est de croire que le sexe a quelque chose à voir avec la mécanique ou les gadgets, dit-il. Ou que la variété le rendra meilleur. » Lorsque je lui ai dit que, venant du propriétaire d’une boutique érotique, cette remarque était plutôt contradictoire, il s’est mis à rire. «Si un couple se dispute, les gadgets sexuels n’amélioreront pas les choses», a-t-il répondu, ajoutant qu’il pouvait deviner d’un coup d’oeil, en voyant entrer un couple dans sa boutique, s’il ferait une vente ou pas. S’il y a des frictions ou si le couple se chamaille, il sait qu’il ne vendra rien.

David McKenzie, sexologue clinique de Vancouver, affirme que la sexualité féminine ne peut s’épanouir que si elle fait place aux émotions, à l’esprit ou à la spiritualité, soulignant qu’elle n’a jamais encore rencontré dans sa pratique une femme qui souhaitait une relation sexuelle si elle était en colère contre son partenaire.

Cela fait bien rire les gens lorsque je leur dis que s’il y a une chose que je ne regrette pas de ma vie de célibataire, c’est le sexe. Pourtant, c’est vrai. Tout ces cabotins qui cherchent à monter au plafond et qui sont déçus que la terre ne tremble pas!

Maintenant que je suis marié, le sexe a pris la place qui lui revenait dans ma vie. Nos séances sont habituellement planifiées. Parfois, les circonstances les empêchent, à d’autres moments, une petite prime vient avec. C’est plutôt élémentaire, sans accessoires ni colifichets. Une fois la chose faite, l’un de nous dira peut-être, ou peut-être pas, que c’était bon, puis nous sombrons dans un délicieux sommeil. Ou bien, nous reprenons nos activités là où nous les avions interrompues; avec trois garçons à charge et deux carrières à mener de front, le moins qu’on puisse dire c’est qu’il y a du pain sur la planche.

Cela n’enlève rien à l’excitation et à la beauté de la chose, bien au contraire. Chocolat-pistaches-prunes? Tutti Frutti? Rocky Road? Non merci! En ce qui me concerne, la meilleure essence, c’est la vanille!