La planète se pèse

Seriez-vous prêt à dire votre poids à un inconnu et à le vérifier publiquement?

La planète se pèse
De l’Argentine à la Croatie et du Canada à la Thaïlande, des centaines de personnes de 25 pays l’ont fait à la demande des reporters de Sélection, pour notre article de février, « Le Poids de la planète ». Armés d’une caméra vidéo et d’un pèse-personne, nos journalistes ont approché 481 passants dans un gigantesque micro-trottoir couvrant Shanghai, Paris, Stockholm, Moscou, New York et 20 autres grandes villes. Sans sourciller, ils leur ont demandé combien ils pesaient, et de vérifier leurs dires en montant sur la balance.

Notre enquête ne se prenait pas au sérieux et n’avait rien de scientifique, mais elle a malgré tout donné des résultats fascinants. Pour nous, Canadiens, elle lance tout un message. D’abord, à travers le monde entier, un impressionnant pourcentage de participants ont évalué correctement leur poids. En Argentine, à Taïwan et en Thaïlande, presque tout le monde a donné une réponse juste, à un kilo près.
Mais à Montréal, parmi les 20 braves qui ont osé monter sur la balance, seulement neuf avait deviné leur poids avec une marge d’erreur de 2,25 kilos. La meilleure performance appartient à une jeune femme de 47 kilos, la seule qui pouvait se considérer comme trop mince. La pire, par contre, venait d’une personne qui se voyait avec 50 kilos de moins.

De plus, 80 pour 100 des participants canadiens ont reconnu qu’ils n’avaient pas de pèse-personne, le pire résultat de notre enquête. En comparaison, 100 pour 100 des Taïwanais interrogés ont déclaré avoir une balance dans leur salle de bain, et plus d’un tiers d’entre eux se pèsent quotidiennement. Aucun autre pays n’a approché ce classement.

Les Hongrois semblent trop occupés pour se soucier de leur poids : 59 pour 100 d’entre eux avouent qu’ils ne se pèsent jamais et seulement la moitié d’entre eux possède une balance.

Les Britanniques ont été les plus réticents à participer à notre enquête : sur les 90 personnes approchées au Canary Wharf de Londres, 80 ont déclaré forfait. En fait, la plupart des femmes ont refusé et certaines ont même tourné les talons au milieu de l’entrevue quand nous avons apporté la balance. A Montréal, quelques volontaires se sont défilé quand la caméra s’est montrée.

A l’inverse, sur la fameuse plage d’Ipanema, à Rio, personne n’a refusé l’interview ni décliné l’invitation à grimper sur la balance. Un Brésilien qui avait sous-estimé son poids a aussitôt rentré son ventre en entendant le résultat. Mais la plupart étaient fiers d’exhiber leur corps mince, musclé et bronzé. « Chez nous, il y a un tel culte du corps que les pèse-personne ne nous font pas peur », dit Sergio Charlab, rédacteur en chef de notre édition brésilienne.

Les New-Yorkais, interrogés alors qu’ils se hâtaient d’aller prendre leur train à Grand Central Station, n’ont pas hésité à monter sur la balance. Mais certains se sont montrés combatifs, un trait typique de la Grosse Pomme. Une femme qui avait sous-estimé son poids de 3 kilos a soutenu mordicus que notre balance était détraquée. Seulement la moitié des participants new-yorkais disent qu’ils ont une balance chez eux.

Nous avons aussi demandé aux gens s’ils se considéraient comme « maigres », « normaux » ou « en surcharge pondérale ». Les Espagnols étaient les moins nombreux à se décrire en surpoids (15 pour 100), suivis par les Australiens (20 pour 100) et les Finlandais (27 pour 100).

Les Canadiens, avec un résultat de 50 pour 100, arrivaient en troisième position, ex-aequo avec la Thaïlande et la Croatie. Donc, le Canada se voit gros. C’est peut-être signe qu’il est temps d’y remédier, non?