Aide humanitaire: aller là où est la souffrance

Depuis son premier séjour d’aide humanitaire en Afrique en 1972, la Dre Danielle Perreault ne cherche qu’une chose: un épisode où l’humanité est sous son meilleur jour.

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Danielle Perreault et l'aide humanitaire.
Mikaël Theimer
Dre Danielle Perreault

Danielle Perreault et l’aide humanitaire

Elle s’imaginait anthropologue, puis infirmière, mais pour combler sa soif d’indépendance et de voyages à travers le monde, elle a choisi de devenir médecin. Alors que son père l’avait prévenue que «l’on ne peut pas faire tout ce que l’on veut dans la vie», rien n’allait arrêter Danielle Perreault, portée depuis l’enfance par cette curiosité insatiable envers l’Autre, et l’Ailleurs. Au fil des années et des missions humanitaires s’est ajoutée une passion pour la communication, dont plusieurs années à la télévision, mais qui n’a jamais surpassé son envie de porter secours. Tremblements de terre, zones de guerre, pays ravagés par le virus de l’Ebola ou la lèpre, cette mère de deux enfants n’a jamais eu froid aux yeux. Et elle a appris que l’on pouvait soulager la misère même avec des moyens très limités. Médecin nomade? Médecin dépanneur? Danielle Perreault se voit surtout comme une exploratrice de l’humain. Elle a aussi senti le besoin de revisiter les expériences, et surtout les rencontres, qui ont jalonné son impressionnante trajectoire professionnelle dans Soigner du Nord au Sud (Québec-Amérique, 2020), un ouvrage qui, selon elle, ne compterait que… 10% de tout ce qu’elle a vécu!

L’aide humanitaire change la vie, et même plusieurs vies: lisez le témoignage de ce médecin qui a passé une semaine à Haïti après le séisme.

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Courir le vaste monde à travers l'aide humanitaire.
littlenySTOCK/Shutterstock.com

Courir le vaste monde

Du Ghana au Bhoutan en passant par le Chili et Haïti: qu’est-ce qui vous motive, et vous fait courir le vaste monde, depuis tant d’années?

Au départ, ce qui m’attirait à l’étranger, c’était la découverte des habitudes culturelles différentes. Ensuite, soulager la souffrance des autres. Cela fait en sorte qu’une personne ne perd pas son pied à cause d’une infection, ou qu’un père de famille ne va pas mourir d’une pneumonie. Mais il faut éviter de se présenter en médecin blanc détenteur de la vérité, et rester modeste. Quand on arrive dans un milieu, il faut rencontrer les autres médecins, savoir comment ça fonctionne, connaître les croyances locales. Certaines populations n’ont jamais vu une aiguille de leur vie. Et ma dernière motivation, une fois de retour à la maison, est de sensibiliser les miens à la grande indigence qui sévit dans tous les coins de la planète.

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La Dre Danielle frôlé la mort à quelques reprises pendant ces missions d'aide humanitaire.
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L’ironie du sort

Vous avez combattu plusieurs épidémies à l’étranger, frôlé la mort à quelques reprises… pour finalement attraper la COVID-19 dans un CHSLD au Québec. N’est-ce pas ironique?

À vrai dire, ce n’est pas étonnant. Quand je suis arrivée dans ce centre d’accueil, je me sentais comme en mission. À un moment, j’avais même l’impression d’être en zone de guerre. La pandémie durait depuis deux mois déjà et je me suis dit: comment aurait-on pu prévenir ça? Ça m’a choquée. On parle beaucoup d’efficience, mais j’espère qu’après la sortie de cette crise, des changements seront apportés pour améliorer les choses et les mettre en place plus rapidement.

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La Dre Danielle est une figure dans le milieu de l'aide humanitaire.
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Exposition médiatique

En plus d’être une figure du milieu humanitaire, vous avez été aussi une figure médiatique. Est-ce que ce travail de vulgarisation médicale vous manque et trouvez-vous qu’il a changé depuis vos débuts?

J’ai commencé à collaborer au journal La Presse avant l’arrivée d’Internet, et je n’avais pas d’ennemis! Il y avait peu de sources d’information, et on pouvait explorer les zones grises. C’était un temps en or pour voguer allègrement sur cette mer sans requins. C’est pourquoi je me pose la question d’un éventuel retour dans les médias: serais-je capable de recevoir les critiques des réseaux sociaux comme les absorbe le Dr Alain Vadeboncœur, par exemple?

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Aide humanitaire: voir l'importance des vaccins.
Syoma Antonov/Shutterstock

Le mouvement antivaccin

Il est souvent la cible du mouvement antivaccin. Êtes-vous inquiète devant sa montée en puissance?

Nous avons vraiment de la chance de pouvoir contempler d’autres choix que ceux qui peuvent nous permettre d’avancer comme société, et comme humanité. C’est un sujet qui m’a toujours bouleversée, et j’y vois un manque de respect envers tous les endroits dans le monde où les vaccins ne sont pas disponibles. Quand je suis arrivée au Togo à 19 ans, je n’avais jamais vu de ma vie les ravages de la polio: des garçons se traînaient à quatre pattes, d’autres se promenaient avec un bâton, les jambes molles, parce que la polio provoque l’atrophie musculaire. Et même si ça n’a pas fait les manchettes, depuis l’an dernier elle est parfaitement contrôlée sur le continent africain grâce à la vaccination.

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Aide humanitaire et évolution de la médecine.
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L’évolution de la médecine

C’est la preuve que la médecine a fait des pas de géant et qu’elle s’est transformée. Toujours pour le mieux?

Même à l’étranger, elle a évolué du traitement des maladies infectieuses vers les maladies chroniques, à cause des changements d’habitudes de vie. Dans le Grand Nord canadien, il y a parfois jusqu’à 10 machines d’hémodialyse dans un village parce qu’il y a un énorme problème d’insuffisance rénale, et en même temps s’établit un fast-food qui offre des beignes et des cafés à 1000 calories. À d’autres endroits, en 2000, je traitais 2 cas de diabète; aujourd’hui, c’est près de 400. On s’en va vers une catastrophe.

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Aide humanitaire: comment soulager la misère?
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Comment soulager la misère

Tout le monde n’a pas la chance, ni la force, de parcourir le monde pour soulager la misère. Que pouvons-nous faire?

Pour soulager, aider et soutenir un voisin ou la communauté, on a beaucoup plus de pouvoirs qu’on pense. L’impact d’un sourire à une voisine que l’on ne salue jamais peut être énorme. Mais ce qui me bouleverse, c’est le manque d’intérêt pour l’étranger, lequel est très peu couvert dans les médias. Je nous souhaite de rester curieux face aux histoires d’ailleurs et de ne plus concevoir des projets de coopération avec l’idée de l’homme blanc comme sauveur. Moi, je suis née ici, mais j’aurais pu naître au Bénin: il y a une part de hasard, et j’ai un peu gagné à la loterie. Ce qui me frappe ici, c’est que nous sommes beaucoup dans la critique et les revendications, mais il faut aussi être dans la reconnaissance et l’action. Car l’action peut changer les choses. 

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