Chirurgie esthétique: 4 raisons de vous méfier

La chirurgie plastique et esthétique, au Québec, est un véritable far west dans la mesure où n’importe quel médecin peut s’improviser plasticien. Les raisons de s’inquiéter sont nombreuses. C’est pourquoi il est vital de se poser les bonnes questions avant de mettre sa peau entre n’importe quelles mains. 

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Quelle est la formation du médecin qui va vous opérer?

Quelle est la formation du médecin qui va vous opérer?

Plus de 302000 procédures esthétiques ont été pratiquées au Canada en 2003, une augmentation de près de 25% par rapport à 2002. Des statistiques plus récentes? Des chiffres plus précis pour le Québec? N’essayez pas d’en trouver, il n’y en a pas. Un peu comme si ce secteur, pourtant en plein essor, n’intéressait personne!

Aucun registre public ne recense non plus les «bavures» de la chirurgie esthétique. Le Collège des médecins ne rend publiques que les plaintes ayant donné lieu à des mesures disciplinaires; en 2006 et 2007, seulement deux d’entre elles concernaient la chirurgie esthétique!

Et trouver un vrai pro de la chirurgie plastique est d’autant plus difficile qu’au Québec, même s’il existe une association de chirurgiens plastiques et esthétiques qualifiés, n’importe quel médecin ayant suivi une formation d’appoint peut jouer du bistouri. Omnipraticiens, ophtalmologistes, dermatologues… ils sont de plus en plus nombreux à ajouter une technique esthétique à leur pratique.

Y a-t-il une formation minimale requise? Même pas. Elle est parfois offerte par les compagnies pharmaceutiques, parfois acquise derrière l’épaule d’un chirurgien.

Ces largesses font bouillir certains membres de l’Association des spécialistes en chirurgie plastique et esthétique du Québec, qui regroupe une centaine de vrais spécialistes. «Pourquoi ferait-on 10 ans d’études et suivrait-on un entraînement chirurgical très astreignant s’il suffit au bout du compte de faire médecine générale?» s’interroge Eric Bensimon, chirurgien esthétique et professeur à l’Université de Montréal. Lui et ses étudiants ont pratiqué cinq ans sous la surveillance d’un chirurgien, en plus de leurs cinq années de médecine. «Entre ça et un stage de trois mois, il y a une différence», s’indigne-t-il.

Comment vous protéger?

• Contactez l’Association des spécialistes en chirurgie plastique et esthétique du Québec afin d’obtenir les coordonnées de chirurgiens en fonction de la spécialité recherchée.

• Vérifiez auprès du Collège des médecins que le spécialiste de votre choix ne fait l’objet d’aucune plainte.

• Ne faites pas confiance aux certificats accrochés au mur. Demandez quelles formations le médecin a suivies, où et en combien de temps.

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Vous a-t-on bien informé?

Vous a-t-on bien informé?

Des femmes me disent qu’elles ont une rupture d’implant mammaire, mais pas d’argent pour une intervention supplémentaire», raconte Jannick Desforges, alors avocate chez Option consommateurs. Dans le domaine de la médecine esthétique, le manque d’information est la plainte numéro un.

Le code de déontologie oblige bien sûr le médecin à bien informer son patient afin d’obtenir un consentement éclairé. «Mais il ne suffit pas de dire qu’une liposuccion n’est pas très risquée, poursuit Lise Goulet. Il faut parler des complications possibles, mettre des chiffres sur les mots.»

Combien de femmes savent, par exemple, qu’elles devront sans doute changer d’implants mammaires un jour? Selon le Dr Bensimon, 90% d’entre elles vont repasser sous le bistouri. Un implant peut être «garanti» 15 ans par le fabricant – le produit de remplacement ne coûtera donc rien à la cliente -, mais celle-ci devra probablement couvrir les frais du retrait de l’ancien et de la pose du nouveau.

Des femmes se laissent aussi berner par des stratagèmes douteux, comme les clauses d’exonération de responsabilité, derrière lesquelles croient se cacher certains médecins. «Celles-ci sont nulles, rappelle Lise Goulet. Aucun médecin ne peut se dégager de ses responsabilités.»

Comment vous protéger?

• Faites-vous accompagner chez le médecin et notez toutes les informations (ou mieux, enregistrez-les) qu’il vous donnera. Cela facilitera la preuve en cas de litige.

• Renseignez-vous sur les risques, aussi minimes soient-ils, et sur les effets secondaires.

• Informez bien le médecin de votre état de santé, actuel et antérieur. Car il existe peut-être une contre-indication entre un aspect de votre santé et l’intervention que vous désirez.

• Demandez au médecin l’explication des termes techniques figurant sur le formulaire de consentement.

• Posez des questions sur le «service après-vente». Qu’il y ait faute ou non, qu’arrivera-t-il si les résultats ne sont pas à la hauteur de vos attentes?

• Rappelez-vous que toute clause de décharge ou d’exonération de la responsabilité est nulle.

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Dans quelles conditions va-t-on vous opérer?

Dans quelles conditions va-t-on vous opérer?

En 2005, le Collège des médecins a publié un «Guide d’exercice des chirurgies en milieu extrahospitalier». Ce document encadre étroitement les conditions d’opération en milieu privé et peut donner lieu à des contrôles… qui, de l’aveu même du secrétaire du Collège des médecins, ont peu de chances d’être effectués. «Avec 19000 médecins membres, la priorité est donnée aux soins médicalement requis», admet Yves Robert. Et pour cause: le Collège ne dispose que de six inspecteurs pour toute la province.

Comment vous protéger?

• Dans la mesure du possible, essayez de visiter les lieux, d’observer les équipements, de discuter avec le personnel pour connaître les conditions de votre opération. Si vous avez un doute, visitez d’autres cliniques.

• Demandez au médecin combien d’opérations de ce genre il a déjà pratiquées et depuis combien de temps.

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Le traitement choisi a-t-il fait ses preuves?

Le traitement choisi a-t-il fait ses preuves?

Il y a trois ans, Jeannette Lechasseur, 65 ans, a subi une blessure à la joue en tombant. Comme l’accident lui avait laissé une vilaine marque, on lui a proposé des injections de Dermalive. Ce produit devait redonner du corps à sa joue, tout comme il regonfle les lèvres ou les rides à d’autres. «Mais un an après les injections, des bosses rouges et granuleuses sont apparues, raconte-t-elle. On me traite depuis à la cortisone, et ce n’est pas fini.» Le fabricant du produit – et Santé Canada qui l’a autorisé – pourrait faire l’objet d’un recours collectif, car des dizaines de Québécois souffrent des mêmes granulomes.

Les implants mammaires réservent eux aussi de mauvaises surprises: pour se protéger, l’organisme produit une sorte de membrane autour de la prothèse, mais il arrive aussi qu’elle épaississe au point de devenir ce que l’on appelle une «coque fibreuse», durcissant le sein et le rendant parfois très douloureux. «Mais ça, on ne peut jamais le savoir avant», admet le chirurgien Eric Bensimon. Cette masse fibreuse peut parfois aussi entraver la détection de cancers du sein, lors des mammographies.

Comment vous protéger?

• Rencontrez plusieurs médecins pour obtenir différents diagnostics ainsi que leur avis sur les techniques qu’on vous a proposées ailleurs.

• Ne vous fiez jamais entièrement à l’information trouvée sur Internet: elle est rarement complète ou totalement objective.

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