Êtes-vous sous-payée?

Trop de femmes hésitent à réclamer un salaire digne de leurs compétences.

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Est-ce que je peux avoir une augmentation?

Est-ce que je peux avoir une augmentation?

À l’étroit dans mon minuscule bureau sans fenêtre, j’entends quelqu’un se racler la gorge derrière moi.

«Vous avez une minute? demande mon chef en refermant la porte.

– Bien sûr, dis-je en ravalant ma salive. Je sens un nœud coulant se resserrer autour de mon cou.

– Pourquoi ne demandez-vous jamais d’augmentation?»

D’accord, ce genre de question n’arrive qu’une seule fois dans une vie – ou même dans deux ou trois vies de suite. Mais, dans celle-ci, vraiment, je ne m’y attendais pas!

«Vous travaillez pour nous depuis un an. Vous êtes incroyablement productive. Vous méritez un meilleur salaire, mais comment voulez-vous que j’en parle à mon patron si vous ne me le demandez pas à moi d’abord?»

Vous ai-je dit que mon chef était le meilleur que j’ai eu dans cette vie et dans n’importe quelle autre?

Heureusement, dans cette vie-ci, je pige vite.

«Est-ce que je peux avoir une augmentation?»

Ce n’est qu’en voyant le montant imprimé sur le chèque de paie suivant que j’ai su combien mon chef avait obtenu en mon nom – environ deux fois ce que j’aurais demandé! J’étais ravie, mais un peu agacée: combien d’argent avais-je perdu parce que je n’avais pas osé demander un peu plus? Que ce soit comme salariée ou comme travailleuse indépendante, parler d’argent a toujours été mon calvaire. J’ai l’impression de mendier.

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Les femmes ont tendance à sous-estimer leur valeur

Les femmes ont tendance à sous-estimer leur valeur

«La plupart des femmes négocient trop mollement», affirme Melanie Hazell, consultante à Toronto. Son métier: préparer des demandeurs d’emploi au délicat pas de deux de la négociation salariale.

Sa remarque ne vise pas que les salariées. Un sondage réalisé par Décima pour le compte de la CIBC montre que les travailleuses indépendantes ont également tendance à se sous-estimer: par rapport aux hommes, elles dirigent deux fois plus d’entreprises dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 50000$ et deux fois moins de sociétés réalisant plus de 500000$. La nature de leurs activités y est pour quelque chose, mais leur manie de se dévaloriser pèse probablement assez lourd dans la balance.

«L’argent est le dernier tabou, souligne Melanie Hazell. Comme nous répugnons à en parler, nous devenons très émotives quand nous y sommes obligées, alors que nous devrions être froidement rationnelles.»

C’est vite dit! Elle ne sait pas que je culpabilise à mort quand je demande une augmentation, que je suis au septième ciel quand je fais un rabais sur mon tarif, que je déborde de reconnaissance… Mais au fond, elle a peut-être raison.

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Comment s'en sortir?

Comment s’en sortir?

En s’informant et en se préparant, dit la spécialiste. «Les gens passent des heures à peaufiner leur C.V., mais consacrent à peine 10 minutes à la préparation de l’entrevue.»

Entrevue? Nous parlions de négocier un salaire, non? «L’entrevue est la première étape de cette négociation», poursuit la consultante. Pour s’y préparer, ses clients dressent une liste de leurs compétences et de leurs réalisations, qui leur permet d’évaluer précisément ce qu’ils ont à offrir. Ensuite, ils se renseignent sur les salaires versés aux titulaires de postes équivalents. Une fourchette ne suffit pas: il faut aussi qu’ils découvrent où se situe leur employeur potentiel entre les deux extrêmes. Le temps qu’ils y mettent n’est pas perdu, car ils apprennent ainsi ce qu’ils valent vraiment et combien telle entreprise serait prête à payer pour leurs compétences.

Cela dit, n’abordez pas le sujet trop vite. Certains candidats demandent à connaître d’emblée la fourchette de salaires sous prétexte qu’il ne sert à rien de poursuivre l’entrevue si elle ne correspond pas à leurs prétentions. Le hic, c’est que cette fourchette possède une certaine élasticité. «Si l’entreprise tient vraiment à vous engager, dit Melanie Hazell, elle trouvera un moyen d’améliorer son offre.»

On n’est jamais mieux placé pour négocier que durant l’entrevue d’embauche, ajoute-t-elle. «Vous aurez du mal à rattraper le terrain perdu une fois que vous serez salariée.»

Si vous l’êtes et que vous pensez avoir droit à une augmentation, la consultante recommande de refaire une comparaison. Déterminez combien gagnent les gens qui effectuent un travail semblable au vôtre et dressez la liste des services que vous avez rendus à votre employeur en insistant sur les cas où vous lui avez fait épargner ou gagner de l’argent. «Chiffrez tout ce que vous pouvez», conseille Melanie Hazell. Ensuite, demandez un rendez-vous avec votre supérieur immédiat et plaidez votre cause.

Après tout, ce n’est pas tous les jours qu’un chef entre dans votre bureau pour vous exhorter à réclamer une augmentation!

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Les tactiques payantes

Les tactiques payantes

«De plus en plus d’entreprises basent leur rémunération sur le rendement, note la consultante Melanie Hazell. Vous pourriez avoir intérêt à demander un salaire moindre et un plus fort taux de commission ou de participation aux bénéfices.» Elle conseille à ses clients de garder l’esprit ouvert. Ses recommandations:

• Évaluez de façon réaliste le salaire que vous pouvez demander, selon la nature du poste et la taille de l’entreprise. Peu importe ce que vous gagniez auparavant: ce qui compte, c’est ce que ce poste-là vaut pour cette entreprise-là.

• Parlez d’argent avec la personne qui ultimement prendra la décision.

• Tenez compte de tous les aspects de la rémunération: salaire, participation aux bénéfices, commissions, congés payés, indemnité de déplacement et autres avantages.

• Mettez-le sur papier! «Des clients qui s’étaient entendus verbalement avec une personne se sont retrouvés le bec dans l’eau quand celle-ci a quitté l’entreprise», raconte Melanie Hazell. Si votre employeur n’établit pas de contrat, rédigez une lettre résumant votre interprétation de l’entente de façon à disposer d’une preuve écrite de votre accord.

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