Les cellulaires sont-ils mauvais pour la santé?

Oui, et ce sont les enfants qui en sont le plus vulnérables. Voici pourquoi, et comment s’en protéger.

Les cellulaires sont-ils mauvais pour la santé?

Comment ça marche

Résumons d’abord certaines connaissances de base que vous savez sans doute déjà: les téléphones cellulaires sont des émetteurs-récepteurs portatifs communiquant avec des antennes de téléphonie cellulaire sur des radiofréquences (RF) qui se situent entre les ondes de radio MF et celles des fours à micro-ondes.

Les radiofréquences des téléphones cellulaires peuvent pénétrer dans le corps. La quantité qu’on en absorbe ainsi que la profondeur à laquelle elles pénètrent dépendent de la distance entre votre cellulaire et votre corps et de la force du signal. L’énergie des RF augmente avec la distance qui vous sépare d’une antenne et selon les obstacles que les ondes rencontrent, ce qui signifie qu’elle peut varier au cours d’un simple appel.

Santé Canada a défini qu’un débit d’absorption spécifique (DAS) maximum de 1,6 watts de radiofréquence par kilogramme de masse corporelle était un seuil d’absorption sans risque pour la santé. « Cette valeur est 50 fois plus basse que le niveau auquel on commencerait à constater des effets sur la santé, affirme Robert Bradley, directeur du Bureau de la protection contre les rayonnements des produits cliniques et de consommation, à Santé Canada. Cela signifie que les appareils répondant à cette norme sont sûrs, quels que soient l’âge des utilisateurs et le temps d’utilisation cumulé. »

Téléphones cellulaires et questions de santé

Les téléphones cellulaires sont donc inoffensifs? Pas si vite! Certains scientifiques s’inquiètent des effets d’une utilisation intensive du téléphone cellulaire pendant de nombreuses années, notamment dans le cas des jeunes utilisateurs d’aujourd’hui. Plusieurs études suggèrent que l’utilisation à long terme serait associée à un risque accru de lente croissance d’une tumeur cérébrale et de cancer du nerf auditif. L’une des plus souvent citées est l’étude menée par Lennart Hardell, un professeur de l’Hôpital universitaire d’Orebro, en Suède. Sa recherche était d’ordre épidémiologique; elle portait sur la fréquence et la distribution d’une maladie, mais elle n’établissait pas de relation de cause à effet. L’étude montrait que les grands utilisateurs de téléphone cellulaire (2000 heures ou 30 minutes par jour sur 10 ans) présentaient 20 % plus de risques de contracter un gliome malin (tumeur cérébrale). Le risque que la tumeur soit située sur le côté le plus utilisé pour téléphoner grimpait de 200 %.

« Pour bien comprendre l’étendue des risques, nous devons mener des études sur un plus grand nombre d’utilisateurs à long terme », a déclaré Lennart Hardell dans un communiqué du BioInitiative Working Group (BIWG), un groupe de 14 scientifiques du monde entier qui doutent que les seuils de tolérance établis soient vraiment sûrs. Le professeur Hardell a montré un risque de tumeur cérébrale 5 fois plus élevé chez ceux qui ont commencé à utiliser un téléphone cellulaire avant l’âge de 20 ans. (Certains scientifiques craignent que les enfants soient particulièrement vulnérables parce que leur tête est plus petite et leurs os crâniens sont plus minces.)

Martin Blank, un des cofondateurs du BIWG, professeur associé de physiologie et de biophysique cellulaire à l’université Columbia, à New York, affirme que la preuve est faite ‘ rapport du BIWG, mis à jour dans le numéro de mars 2009 de Pathophysiology, portant sur 15 études ‘ que la force du champ électromagnétique des RF actuellement considérée comme inoffensive peut endommager l’ADN humain. « Les RF ont une incidence biologique, dit le professeur Blank. Leur énergie est plus faible que celle des micro-ondes, mais elle est de la même nature. » Le BIWG recommande que les normes soient établies à des niveaux 1000 fois plus bas que les normes actuelles. Pour la santé des enfants, il suggère que ces derniers n’utilisent un téléphone cellulaire qu’en cas de nécessité.

Santé Canada, le National Cancer Institute, aux États-Unis, et l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) font remarquer que ces études n’établissent pas concrètement un lien avec le cancer et citent d’autres recherches qui ne montrent aucune augmentation des risques. Ces dernières années, toutefois, la Finlande a recommandé aux enfants de favoriser l’envoi de messages textes, Israël a mis en garde ses citoyens de se tenir à plus de 50 cm des chargeurs de batterie (qui émettent plus de radiofréquences) et la France débat d’une loi qui interdirait la publicité pour les téléphones cellulaires s’adressant aux moins de 12 ans et la vente de tels appareils pour l’utilisation par des enfants de moins de 6 ans. De leur côté, le Canada et les États-Unis n’ont pris aucune mesure de ce genre. (En fait, Firefly Mobile, une compagnie des États-Unis, fait sur son site Internet la promotion du « téléphone cellulaire pour les enfants ». Elle cible les enfants et les préadolescents avec des appareils colorés bourrés de jeux et montrant deux gros boutons avec un icone pour joindre rapidement maman et l’autre pour papa.)

Le public aurait pourtant besoin de réponses claires et plus tranchées. Les preuves qu’attendaient de nombreux gouvernements ‘ les conclusions du projet INTERPHONE, une étude menée dans 13 pays par l’OMS sur la téléphonie cellulaire et les risques de cancer ‘ ne semblent pas apporter les réponses espérées. La publication du rapport final, attendue l’automne dernier, a été retardée pour cause de mésentente entre les chercheurs. Certains résultats préliminaires ont en effet été mis en doute par des scientifiques en raison de la pauvre qualité des données (la mesure du taux d’utilisation est trop dépendante de la mémoire des participants ‘ une critique qui s’applique à de nombreuses études épidémiologiques). En outre, aucune des études du projet INTERPHONE n’a inclus des enfants.

Que peut-on conclure?

Pour l’heure, le laboratoire de Santé Canada de Robert Bradley n’a pas réussi à reproduire les résultats des études qui établissent un lien de cause à effet entre les RF et les dommages à l’ADN. « Le côté rassurant, c’est que si un risque de cancer existe, il est terriblement difficile à établir », dit-il, et il ajoute que les connaissances actuelles sont insuffisantes pour émettre des avis éclairés : « Limiter l’utilisation à 5 minutes par jour? À 2 heures par jour? Rien ne permet d’être catégorique! »

Tout le monde n’apprécie pas forcément cette approche attentiste. « Puisque la science est pleine d’incertitudes, il est d’autant plus important de fournir de l’information au public afin que les gens puissent prendre leurs propres décisions », lance Loren Vanderlinden, superviseure des évaluations et politiques d’hygiène environnementale au Bureau de santé publique de Toronto qui a conseillé de limiter l’utilisation des téléphones cellulaires. « Nous appliquons simplement le principe de précaution. »

Comment limiter l’exposition

‘    Limitez l’utilisation par des enfants à l’envoi de messages textes et aux appels urgents.
‘    Parlez moins longtemps, envoyez des messages textes ou utilisez une ligne fixe.
‘    Utilisez un casque ou une oreillette. Ces accessoires n’émettent à peu près aucune radiofréquence. Transportez votre téléphone dans votre sac à main ou sac à dos (il est entendu que le risque n’existe que lorsque le téléphone cellulaire est allumé).
‘    Choisissez un téléphone cellulaire qui affiche un faible DAS. Pour trouver le débit d’un modèle particulier, visitez mmfai.org/public/index.cfm?lang=fr.
‘    Ne vous fiez pas aux accessoires censés réduire l’exposition aux radiofréquences comme les boucliers. Il n’y a aucune preuve que cela marche, et ils peuvent interférer avec le fonctionnement de l’appareil.

Et vous, qu’en pensez-vous? Limitez-vous l’utilisation du téléphone cellulaire de vos enfants, ou même la vôtre? Donnez votre avis en écrivant un commentaire.