Le Cirque Alfonse de retour au bercail

Le succès international du Cirque Alfonse lui permet maintenant de se produire enfin chez lui, au Québec.

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Le Cirque Alfonse de retour au bercail

Le Cirque Alfonse charme la presse internationale

Brillant, original et énergique. Voilà les qualificatifs employés par la presse internationale  pour désigner Timber !, un spectacle sur nos bûcherons d’antan signé le Cirque Alfonse, une compagnie composée de huit acrobates et musiciens, originaire de Lanaudière.

Applaudie par des milliers de spectateurs sur trois continents, la fresque parvient  « à saisir la joie qu’on peut éprouver à travailler avec des arbres », a suggéré le Guardian de Londres. À New York, le journaliste du Time Out est tombé sous le charme de ces Québécois complètement dingues, vêtus de camisoles et de peaux de castor qui jonglent avec des haches, cabrio­lent sur des billots, multiplient les numéros de barre rustre et s’élancent entre des cerceaux formés de scies bien aiguisées.

Fondé par Antoine Carabinier-Lépine et sa sœur Julie, le Cirque Alfonse se présente d’abord comme une affaire de famille. Durant les spectacles, le public voit tournoyer au-dessus de sa tête pas moins de trois générations de saltimbanques.

Et cette année, la troupe s’est enrichie d’un deuxième membre préscolaire avec l’arrivée de Jules, le petit frère d’Arthur, trois ans, que sa maman Julie Carabinier-Lépine et son papa Jonathan Casaubon ont présenté un soir à la tombée du rideau au public attendri du NYU Skirball Center for the Performing Arts de New York. Âgé d’à peine quelques mois, Jules a même accompli sa première acrobatie en se tenant debout sur la main tendue de son papa.

Cet esprit de corps n’exclut pas les aînés qui, depuis le début jouent un rôle fondamental. Tandis que le patriarche Alain vole souvent la vedette avec des numéros plutôt audacieux pour un homme de 68 ans, grand-maman Louise s’affaire en coulisses où elle gère la logistique, les subventions, voit aux costumes et à l’harmonie familiale. « C’est elle qui travaille le plus dur », souligne Antoine à propos de sa mère.

Mais le Cirque Alfonse n’est pas que virtuosité et conte de fées. Derrière le folklore, on décèle une proposition de cirque très contemporaine, ainsi que des propos bien sentis sur la nécessité de préserver nos traditions. De fait, son succès repose avant tout sur l’authenticité. Conséquemment, la troupe a choisi de conserver tous ses textes en français, même si parfois le public de Londres ou de Hong Kong a un peu de mal à s’y retrouver.

Un des atouts du clan réside dans son look cent pour cent terroir. Barbus, musclés, poilus, les gars s’affichent comme de gros ours hilares et bon enfant. Quant aux filles, elles jouent la carte rustique avec pantalon de velours et chemise de flanelle. « Au début, on se censurait, rappelle Antoine Carabinier-Lépine. On craignait de tomber dans la caricature. On s’est rendu compte que plus on en mettait, plus les gens aimaient. »

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L’histoire du Cirque Alfonse a commencé en 2006 à l’occasion du 60e anniversaire d’Alain Carabinier, dit le patriarche. Né en Suisse, cet ancien champion de ski a émigré au Québec il y a une trentaine d’années. Il y a marié Louise Lépine, une physiothérapeute originaire de Lanaudière. Le couple a eu deux enfants férus des arts de la piste ; Julie étudiait la danse contemporaine et Antoine est diplômé de l’École nationale du cirque.

Pour les soixante ans du papou, ses deux enfants ont conçu un spectacle intitulé La brunante sur le thème de la veillée québécoise. « Mon père, rappelle Antoine, avait toujours rêvé de monter sur les planches. Le Cirque Alfonse est donc né d’une volonté de le remercier de son soutien. Puis, la troupe s’est dissoute et chacun est parti de son côté. Quand on a remis ça avec Timber !, quatre ans plus tard, quelque chose s’est produit. On a trouvé notre personnalité. »

Porté par des airs traditionnels et des compositions originales (signés entre autres par David Boulanger qui a œuvré avec La Bottine souriante), Timber ! revient sur un chapitre oublié de notre histoire collective : la vie de chantier. « Le spectacle, explique Antoine, était destiné  à nos compatriotes. » Si la troupe s’est produite dans une douzaine de villes au ­Québec, elle n’a pas réussi à percer dans les grands centres tels Trois-­Rivières et Québec (où le spectacle a dû être annulé faute de billets vendus), à part Montréal où la TOHU a été d’un grand soutien.

Au pied du mur, la troupe a tenté sa chance sur la scène internationale où son épopée sur les bûcherons a attiré l’attention des programmateurs de théâtre d’une trentaine de villes, sur trois continents. C’est ainsi que, depuis 2012, le clan Carabinier-Lépine passe les trois quarts de l’année sur la route, notamment aux États-Unis, en Europe et en Asie. Et ce n’est pas fini !

À l’affiche dès le mois de juin à la TOHU, Barbu, son prochain spectacle, promet d’être « l’affaire la plus surprenante de l’heure », si l’on en croit le journaliste Claude Deschênes qui l’a vu en primeur l’été dernier. « Le plus ironique, observe pour sa part le metteur en scène de Timber !, Alain Francœur, c’est que la reconnaissance internationale va nous permettre de venir enfin jouer à Québec. »

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