Give a mile : Donner ses milles aériens pour une bonne cause

Give a mile est une initiative à la fois brillante et inspirante. Grâce à des dons de air miles, Kevin Crowe aide de nombreux patients mourants à retrouver leurs proches.

Give a mile : Donner ses milles aériens pour une bonne causeEn avril 2010, Kevin Crowe était en deuil de son meilleur ami, victime d’un cancer au cerveau.

À 37 ans, Ryan Westerman était l’un des hommes les plus gentils que Kevin ait jamais connus. « Il avait toujours des amis datant de la maternelle. Et il aimait tellement donner l’accolade qu’on en parle encore aujourd’hui. » Cette joie avait marqué ses derniers jours.

Avant de mourir, il avait organisé une fête pour sa famille et ses amis, comme pour leur dire que la vie était un cadeau précieux.

Kevin voulait lui rendre hommage, mais comment ? Il a commencé par faire du bénévolat à l’hospice South­wood de Calgary, en 2011. Une fois par semaine, Kevin, cadre dans une entreprise d’informatique, distribuait des collations dans cet établissement de 24 places. Souvent, il tenait compagnie aux patients en phase terminale, qui finissaient toujours par parler de leurs proches absents – parent, grand-­parent, frère ou sœur, enfant – incapables de s’offrir un billet d’avion pour venir faire leurs adieux.

Kevin songeait qu’il serait dévasté s’il devait finir ses jours loin de sa femme et de son fils de 12 ans. Il a compris que réunir les mourants et leurs proches serait le parfait hommage à rendre à Ryan.

Puis, il a découvert sur Kula, une plateforme virtuelle répertoriant des centaines d’associations caritatives du monde entier, que 10 mille milliards de milles aériens étaient toujours inutilisés. Il tenait sa réponse.

En février 2013, il a fondé Give a Mile, un organisme à but non lucratif permettant aux Canadiens de donner, via internet, des milles Aéroplan et autres points de fidélité à des patients recommandés par des hôpitaux et centres de soins palliatifs de tout le pays.

D’autres organismes acceptent les milles aériens (Vols d’espoir offre des vols gratuits aux Canadiens pour des traitements médicaux non dispensés dans leur région), mais aucun n’aide les gens à venir rendre visite à des proches gravement malades.

Dès juin 2013, Kevin Crowe et son équipe de 20 bénévoles avaient réservé 25 vols. Une Calgarienne de 30 ans atteinte d’un cancer au cerveau, mère de cinq enfants, a ainsi retrouvé son amie d’enfance de Nouvelle-Écosse. Avant la fin de 2014, il prévoit offrir 33 autres vols. Son objectif ? Redistribuer un milliard de milles aériens, soit environ 40 000 billets d’avion. Pedro Miranda fait partie des patients mis en relation avec Kevin grâce au centre anticancéreux Tom Baker de Calgary. Immigré au Canada en 2008, Pedro avait rapidement trouvé du travail comme paysagiste, mais sa femme, Maribel, et sa fille, Samantha, étaient restées au Nicaragua. En octobre 2013, à 51 ans, on lui avait diagnostiqué un cancer colorectal et gastrique de stade 4. Condamné, il s’inquiétait pour sa famille.

Et soudain, Kevin lui offrait de la faire venir, et même de recruter des avocats pro bono pour leur obtenir les visas. Arrivée le 10 avril, la famille de Pedro était restée 20 jours. Sa fille,
qui avait toujours rêvé de voir la neige, courait sur les trottoirs blancs : « Elle m’a donné la force de subir ma chimio », témoigne-t-il.

Selon Donna Wilson, qui enseigne à la faculté des sciences infirmières de l’Université de l’Alberta, Give a Mile comble un vide dans le domaine : « Le besoin le plus urgent d’un patient en fin de vie est émotionnel : il regrette des disputes, des choses qu’il a faites ou non. » Face à la mort, on souhaite souvent plus que tout une issue salutaire ou, comme Pedro Miranda, l’assurance que tout ira bien pour ses proches.

L’un des plus récents vols organisés par Kevin était pour Aubri, une fillette de sept ans atteinte de leucémie. Comme sa famille avait peu de soutien à Calgary, Kevin a fait venir les grands-parents de l’Ontario.

Au téléphone, il a entendu le moment où la mère d’Aubri a saisi le sens de ses paroles. « Il s’agit de réunir des gens, de leur donner une dernière chance de dire ce qui doit être dit », confie Kevin.